02 novembre 2002

david b et joann sfar, urani

[cette critique est parue originellement sur le site bdparadisio]

J'ai voulu écrire une critique de Urani pour contrebalancer les critiques quelque peu négatives des internautes précédents. Mais au bout du compte, je dois avouer que mon appréciation de l'album est mitigée, même si à mon avis, La ville des mauvais rêves est une série au potentiel énorme. De fait, j'ai l'impression (erronée?) que la série a été plus ou moins abandonnée par ses auteurs et/ou son éditeur, ce qui serait fort triste.

Il me semble évident que David B et Joann Sfar ont créé ici un noyau scénaristique qui ne demande qu'à exploser dans toutes les directions et qui n'en a jamais eu l'occasion, en partie, je crois, à cause de la sempiternelle contrainte des 46 pages. Dans ce registre "album couleur", l'album souffre de la comparaison avec des produits scénaristiquement très bien ficelés, mais pas nécessairement plus intéressants pour autant.

Urani peut rebuter le lecteur pour deux raisons: d'abord le scénario, coupé au couteau, peu limpide et pas toujours cohérent, et le dessin de Sfar, un peu chancelant en comparaison à ce qu'on l'a vu faire ailleurs. Pour ce qui est de David B, que je ne connais pas très bien, on peut dire que son style faussement classique est plutôt réussi dans ce contexte, surtout alors que la couleur s'en mêle. Dès les premières pages, j'ai quasiment eu l'impression d'être au beau milieu des Voleurs du Marsupilami. Le livre comprend de très belles scènes aussi, particulièrement vers la fin. Là, on sent que les auteurs réalisent enfin la chimie tant attendue, mais c'est trop tard: le livre s'arrête et ne nous donne pas beaucoup de réponses.

Cela dit, ne serait-il pas plus judicieux de continuer l'histoire en noir et blanc chez l'Association ou ailleurs, sur une centaine de pages ou plus? Question de laisser aux auteurs la liberté de mouvement (et d'erreur) que ce projet semble exiger... Parce qu'il y a vraiment quelque chose d'intriguant dans cette histoire de superhéros blasés et inopérants pris au milieu d'une réalité hyper complexe. Avec une histoire aussi étrange et risquée, un album raté est déjà mieux que rien du tout... En attendant, vivement les rééditions du Tengû carré et de Paris-Londres chez l'Asso!