tezuka productions, osamu tezuka, biographie: 1928-1943
[cette critique est parue originellement sur le site bdparadisio]
Une biographie d'auteur de BD, écrite en BD, faut l'avouer, ce n'est pas si courant, le McCay, les Aventures d'Hergé ou la Vie exemplaire de Jijé mises à part. Cette Biographie d'Osamu Tezuka (créateur entre autres d'Atomu-san, alias Astro le petit robot) montre que le genre mériterait d'être davantage exploité.
D'abord, les bons points. L'ouvrage est touffu et il nous brosse un portrait très large de l'auteur dès ses premiers balbutiements. En filigrane, l'Histoire est en train de s'écrire au Japon, la Deuxième guerre se joue (et se perd), le récit se terminant sur l'occupation américaine. Occupation à laquelle Tezuka semble d'ailleurs étrangement sympathique, lui qui raffole depuis son jeune âge de culture américaine.
Très tôt, le petit Osamu se passionne de manga. Et très vite, il en dessine lui-même. C'est l'occasion d'intégrer au récit, de façon assez ingénieuse, des textes, des BD et des dessins du jeune auteur. Certains de ces dessins de jeunesse sont d'ailleurs si réussis qu'on aurait voulu les voir agrandis en pleine page. Et que dire des extraits du Sukippara no burusu ("Le blues du ventre creux"), récit manifestement autobiographique écrit des années plus tard et qu'on aimerait bien voir publié en entier si ce n'est déjà fait.
Or donc, un bon livre, bien ficelé. Alors pourquoi une note mitigée ? Eh bien surtout pour le style impersonnel et très pudique de ce livre, écrit par un studio fondé par l'auteur (Tezuka Productions incidemment), sans nom d'auteur. Et là on doit se demander si Casterman fait son travail d'éditeur en ne mentionnant même pas le nom des auteurs de cet ouvrage! Que ces noms ne paraissent pas dans la version japonaise, on n'y peut rien, mais que diable, on est chez Casterman! La maison des auteurs, quoi! Là, c'est n'importe quoi, on se croirait chez Walt Disney. C'est ce genre de pratiques qui font que même aujourd'hui, le grand public ne sait toujours pas qui sont Floyd Gottfredson ou Carl Barks. Mais je m'emporte.
Autre conséquence de l'écriture en studio, on sent le travail de comité : les descriptions sont parfois mièvres à l'ennui et c'est bien parce que l'histoire de cet auteur est en elle-même extraordinaire que l'on dévore le livre autrement sans grande saveur bien que techniquement impressionnant. Tezuka lui-même est dépeint dès son jeune âge comme un génie et un surdoué, son talon d'Achille étant sa faible constitution : il est nul en sport. Croyant peut-être que le respect du maître implique sa déification, le studio Tezuka peine à faire paraître son maître comme un être humain. Tout cela sent la commande et on se plaît à imaginer ce qu'aurait donné un véritable travail d'auteur sur le sujet.
Malgré tout cela, la lecture de ce premier tome reste intéressante et les prochains tomes (d'ailleurs, un doute m'étreint ainsi que mon portefeuille: combien y en aura-t-il?), où le jeune homme deviendra l'artiste, pourraient s'avérer passionnantes.
Ah et puis à l'attention de Casterman (paraît qu'ils lisent ça), quelques petites idées de biographies futures à faire en BD: pourquoi pas une Vie de Franquin par Bravo? Greg par Yann? Hugo Pratt par Van Hamme? :)
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