29 avril 2003

winshluss et cizo, monsieur ferraille

[cette critique est parue originellement sur le site bdparadisio]

Attention: ceci n'est pas un livre pour enfants. Monsieur Ferraille est un personnage créé de toutes pièces pour le magazine du même nom (le magazine Ferraille, donc), lui-même une autre production du prolifique et fort recommendable éditeur Les requins marteaux.

Oui, c'est vrai, il faut aimer les gags idiots qui tartinent très très gras. Cela dit, c'est fait avec esprit (tiens donc) et on ne s'ennuie jamais. Plusieurs gags courts (et hilarants) pour débuter la lecture, puis la pièce de résistance: L'épopée commerciale de Monsieur Ferraille, délire historique (et esthétique) d'une trentaine de pages, "documents d'époque" à l'appui, qui va comme ça de la France d'entre-deux-guerres à l'Amérique profonde des années 50, sans oublier l'Occupation, Berlin sous les bombes (en compagnie du Fürher complètement paranoïaque, le mauvais goût n'ayant, après tout, aucune limite (c'est pour ça qu'on l'aime bien)) et quelques épisodes modérément édifiants chez les communistes soviétiques. Tout au long de l'histoire, les auteurs du Super Robot s'"adaptent" à toutes les idéologies avec une couardise et une mauvaise foi éléphantesques. C'est irrévérencieux et vraiment très drôle.

Je m'en voudrais de passer sous silence l'immense richesse graphique de l'ouvrage, et la qualité du dessin et des couleurs, en bonne partie réalisés par l'impossible Winshluss. Non mais regardez-moi ce dos de couverture! Ça pue le talent! Quant aux traitements informatiques de Cizo (utilisés pour créer l'effet "document d'époque", ou pour "copier-coller" des dessins déjà existants), ils sont, ma foi, très judicieux et sacrément bien foutus.

Un livre superbe jusque dans sa reliure cartonnée très "BD", laissant planer le doute jusqu'au bout quant à l'inocuité de l'ouvrage. On n'en demandait pas tant, mais on ne se plaint pas. À classer amoureusement sur l'étage du haut, entre Schlingo et Willem.